• Le Creusot, le nouveau dossier qui ébranle Areva

    Le Creusot, le nouveau dossier qui ébranle Areva

    Le site Areva Creusot, Saône-et-Loire, forge usine grandes pièces métallurgiques îlots nucléaires centrales.

    Le site Areva du Creusot, en Saône-et-Loire, forge et usine les plus grandes pièces métallurgiques des îlots nucléaires des centrales. - HAMILTON/REA

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    Veronique Le Billon / Chef de service adjointe | Le 02/05 à 19:43, mis à jour à 20:17    Lien
     

    EXCLUSIF - L’audit mené après la découverte d’une « anomalie » sur la cuve de l’EPR de Flamanville a révélé des incohérences dans les dossiers de fabrication des composants nucléaires sur le site d’Areva au Creusot. Il pourrait s’agir de falsifications.

    « Il y aura encore des lendemains difficiles, des doutes, peut-être des accrocs », est venu dire Emmanuel Macron aux salariés de l’usine Creusot Forge d’Areva en Saône-et-Loire, lundi. Dans le grand hall de l’atelier destiné à forger les composants des centrales nucléaires, sans doute le ministre de l’Economie pensait-il aux « anomalies, en cours de caractérisation, dans le suivi des fabrications » concédées vendredi par l’équipementier public en difficulté.

    Suite aux défauts trouvés sur la cuve de l’EPR en construction à Flamanville, l’audit mené sur les fabrications de Creusot Forge a détecté des incohérences dans les dossiers de fabrication. Selon une source au fait du dossier, ce seraient en réalité des falsifications sur des dossiers de fabrication sur son site de Creusot Forge que pourrait devoir reconnaître Areva. « Je ne peux pas l’exclure », a indiqué Philippe Knoche, le directeur général d’Areva aux « Echos ». « On a des procès-verbaux contradictoires. Soit il y a eu des essais complémentaires qui ne sont pas tracés, et il faut qu’on ait la conviction qu’ils existent. Sinon, il faudra en tirer les conséquences », explique-t-il. « Nous avons souhaité communiquer parce que c’est inacceptable mais nous sommes encore en train de chercher. » Du côté de Bercy, on attend les résultats complets de cet audit avant de tirer des conclusions.

    Modification des résultats

    Selon l’Autorité de sûreté nucléaire et Areva, environ 400 dossiers de fabrication sont concernés par des « incohérences », sur environ 10.000 dossiers de fabrication audités sur une période remontant à une cinquantaine d’années. Tous les types de composants fabriqués chez Creusot Forge, qu’ils appartiennent à l’îlot nucléaire (viroles de générateurs de vapeur, éléments de cuve…), à l’îlot conventionnel (rotors de turbine) ou à des applications non nucléaires, sont concernés. Une grosse moitié des dysfonctionnements concernerait des pièces nucléaires, indique une source.

    Selon nos informations, un opérateur réalisant des essais sur une pièce métallurgique inscrivait sur le dossier de fabrication les résultats sur l’analyse chimique de coulée, les paramètres de forgeage, l’historique de traitement thermique, les résultats des essais mécaniques, etc. Ces résultats étaient ensuite reportés dans des procès-verbaux par des coordinateurs qualité, pour attester de la conformité des pièces forgées. Or, en cas de valeur obtenue dans le haut de la norme requise, les procès-verbaux de certains dossiers de fabrication auraient été modifiés, indique une source au fait du dossier, avec un procès-verbal « officiel » retenant une valeur « moyenne » dans le rapport de fin de fabrication. Les clients – EDF et le Commissariat à l’énergie atomique, mais aussi des électriciens étrangers – ne voyaient quant à eux que le rapport de fin de fabrication, conforme aux normes requises.

    Quinze jours pour évaluer l’impact

    Si l’audit a permis de mettre cela au jour, c’est parce que tous les procès-verbaux ont été conservés, dans des dossiers séparés. « C’est grave, mais cela a été la pratique de la sidérurgie, pour ne pas avoir à justifier de valeurs hautes auprès des clients », indique une source. Le site, ex-Creusot Loire, est passé entre les mains de plusieurs propriétaires sur la période incriminée, et a été repris par Areva en 2006. « Ce que l’on sait, c’est aussi qu’il y eu des mises au rebut importantes de pièces à cette époque », tempère-t-on à Bercy. Autrement dit : seules les pièces en faible écart avec les normes auraient fait l’objet de modifications.

    L’Autorité de sûreté nucléaire a donné quinze jours à Areva pour évaluer l’impact de ces « anomalies » sur la sûreté des pièces fournies à ses clients. Le comité technique mis en place par Areva, avec EDF, estime pour l’instant que « l’intégrité mécanique des pièces » n’est pas mise en cause par la découverte des « anomalies ». Les pratiques auraient cessé entre 2010 et 2012, quand les coordinateurs qualité ont été rattachés à la direction qualité, et non plus à la direction technique.

    Multiples répercussions possibles

    Le dossier pourrait avoir de multiples répercussions pour une filière nucléaire française qui vante son expertise et sa qualité. Les clients d’Areva pourraient être amenés à lui demander des comptes. Les résultats de cet audit pourraient aussi sévèrement compliquer la restructuration d’Areva NP, la division Réacteurs d’Areva qui doit être reprise par EDF et à laquelle appartient Creusot Forge, en faisant peser une lourde hypothèque sur la valeur d’Areva NP.

    La crédibilité de l’ASN pourrait aussi être ébranlée, car elle n’avait manifestement pas accès à l’ensemble des procès-verbaux. « La situation a changé depuis quelques années », indique une source syndicale.

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